“En Camargue, le riz joue un grand rôle écologique”
Propos recueillis par JULIEN CLAUDEL | Photographie JEAN-CLAUDE AZRIA
Bertrand Mazel, représentant des riziculteurs français et européens
Aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Bertrand Mazel est président du Syndicat des riziculteurs de France et président de l’Union des riziculteurs européens. Il explique en quoi la filière camarguaise, une production de 70 000 tonnes par an qui concerne 2 000 emplois directs et indirects, rend également de grands services à l’environnement, notamment par l’irrigation et la dessalinisation de tout le delta rhodanien.
Être riziculteur en Camargue, chez vous cela signifie quoi ?
Cela fait une trentaine d’années que je cultive du riz, sur environ 400 hectares dont 200 de riz, entre Sylvéréal et les Saintes-Maries-de-la-Mer. Je suis installé le long du Petit Rhône, au cœur du Parc naturel régional de Camargue, et je produis environ 1 000 tonnes de riz chaque année. Sur 200 autres hectares, je cultive des pommes de terre et du blé dur.
Le riz est une culture vivante qui demande toute l’attention de l’agriculteur, on est plus proche du métier d’éleveur que de celui du céréalier, dans la mesure où le contrôle est quotidien, notamment en ce qui concerne la gestion de l’eau, et on ne peut jamais s’absenter longtemps des parcelles.
Comment se porte la filière du riz de Camargue ?
Avec une production annuelle de 70 000 tonnes, 160 fermes sont engagées dans la démarche IGP (un tiers dans le Gard et deux tiers dans les Bouches-du-Rhône) et, entre les producteurs, les organismes stockeurs, les riziers et les conditionneurs, on compte jusqu’à 2 000 emplois directs et indirects. C’est donc une filière qui se maintient pas trop mal, dans un contexte où la demande augmente même légèrement chaque année.
Classé en IGP (Indication géographique protégée), le riz de Camargue suscite un engouement lié aux nouvelles attentes de relocalisation alimentaire : les consommateurs souhaitent des produits mieux tracés géographiquement et ils savent que la riziculture française est plus exigeante en termes de respect de normes environnementales que dans d’autres pays; à cet égard 27 % des surfaces rizicoles sont certifiées bio et la moitié sont labellisées HVE (Haute valeur environnementale). Néanmoins, la production a tendance à stagner ces dernières années, car la profession fait face à des difficultés techniques qui ne lui permettent pas de produire beaucoup plus, même si on avance peu à peu avec l’ensemble des partenaires et des acteurs de la filière.
Le riz français occupe la cinquième place en Europe après l’Italie, l’Espagne, la Grèce et le Portugal.
“Il existe une soixantaine de variétés de riz différentes, en gros on produit tous les riz du monde, sauf le Basmati”
La riziculture joue-t-elle un rôle particulier dans l’écosystème camarguais ?
C’est d’abord une culture d’une grande diversité. Il existe une soixantaine de variétés différentes de riz, nous produisons tous les riz du monde (sauf le Basmati typiquement asiatique), ils s’associent à de multiples usages : le riz à sushi, à desserts lactés, à risotto, les riz colorés blancs, rouges ou noirs, complets (ou cargos), les riz ronds, longs, moyens, aussi les riz parfumés. À la différence de ses cousins génériques qui circulent sur le marché international, on pourrait dire que le riz camarguais s’adresse à des segments de marché de plus en plus spécifiques, un peu à l’image des cépages en viticulture.
C’est ensuite la principale culture qui permet de faire circuler l’eau douce sur tout le territoire marqué par une forte salinité, plus de 400 km de canaux entretenus en permanence maillent le parc naturel et sont à la base de la diversité des paysages tout en assurant les besoins des élevages extensifs de chevaux et de taureaux de Camargue.
Une faune et une flore très variées sont également directement bénéficiaires de la riziculture. Sans le riz, la Camargue ne présenterait pas du tout les mêmes richesses écologiques !
le point de vue de Michel Kayser**, Alexandre
« Il y a trente ans, j’ai été initié au riz rouge de Camargue. La qualité des riz du delta rhodanien n’a jamais cessé de progresser pour devenir aujourd’hui un produit remarquable. Tout comme les asperges, le riz se conjugue à l’infini en risotto, à la créole, en accompagnement et en dessert… Au sein de notre établissement nous proposons d’ailleurs un riz au lait revu et corrigé, faisant appel à nos souvenirs d’enfance, et camarguais naturellement. »
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