Escapade

Balade gourmande jusqu’au lac du Bonheur de Camprieu

Textes et photos par Julien CLAUDEL

Entre le mont Aigoual et Meyrueis, une petite retenue d’eau aménagée dans les années 1970 a créé les conditions d’une escapade unique capable d’arrêter le temps. Pour y aller, prévoyez la journée et munissez-vous d’un panier pique-nique que vous remplirez de multiples bons produits à découvrir sur la route.

Le Gard a ceci de particulier qu’on peut s’y perdre avec une grande facilité. Entre mer et montagne, la diversité de ses paysages, la variété de ses géologies et la densité de ses milieux naturels finissent par former quelque chose de grandiose. Tenez, par exemple, connaissez-vous le lac du Bonheur à Camprieu ? Si ce n’est pas le cas, on ne vous en voudra pas. Nous voilà aux antipodes du département, par-delà les Cévennes et l’Espérou, le col de la Serreyrède et le mont Aigoual, juste à la frontière avec la Lozère. Tout ce qui est petit est mignon, dit-on, et le lac du Bonheur est une belle illustration de cette maxime populaire. Posé paisiblement sur un plateau par 800 m d’altitude, c’est le spot de baignade le plus agréable de cette petite région bénie, entourée de pelouses subalpines et de forêts de sapins née du reboisement de l’Aigoual au début du siècle dernier. L’eau est assez fraîche. Elle descend tranquillement du sommet gardois pour plonger sous terre à la « Perte du Bonheur » et resurgir à l’abîme de Bramabiau, ce site très étonnant en forme de faille dans une falaise, à visiter à côté et où siffle un fameux vent dont on dirait qu’il ressemble au brâme d’un bœuf, autrement dit en patois au « bramabuòu ».

Pour cheminer vers ce coin de paradis, prévoyez du temps. Une bonne journée si vous venez de la plaine. Prévoyez aussi des casquettes pour les petits, des maillots de bain pour tout le monde et une ou deux cannes à pêche pour les actifs. Fauteuils pliants, nattes de plage ou draps de bain, faites vos jeux. Enfin, munissez-vous d’un grand panier, si possible en osier, toujours plus engageant que ce vieux sac bariolé du supermarché, car sur le chemin, vous aurez envie de faire quelques haltes qui vous aideront à définir le menu pique-nique du midi.

Pour commencer, vous prendrez bien une baguette ou du pain complet bio à la boutique paysanne de Ganges « Au gré des saisons », c’est dans l’Hérault… mais bon ! Une trentaine de producteurs y sont réunis. Outre le pain, ils proposent des allers-retours de saucisse sèche et des terrines maison, ou encore des fruits et légumes à la croque de saison pour les appétits non carnivores. Plus loin, longeant la vallée de l’Hérault tout en lacets à partir de Pont d’Hérault (dans le Gard !) vous trouverez des confits d’oignons doux, des jus de pommes reinettes, des cerises ou des fraises de printemps au magasin de la « coopérative Origine Cévennes » de Saint-André-de-Majencoules, celle qui exporte dans toute la France les fameux bulbes AOP inscrits au patrimoine de la grande cuisine. Alors que vous reprendrez le convoi, le bord de route vous fera parfois de nouveaux appels de roue avec ses producteurs amateurs ou professionnels qui attendent le chaland pour faire commerce de leurs miels, pommes et autres confitures de châtaignes. Puis, à partir de Valleraugue (on dit de nos jours Val d’Aigoual), plus rien sinon… la grimpette et la contemplation d’un paysage cévenol intemporel et son roulis automobile à faire tourner la tête des enfants, jusqu’au village de l’Espérou. Direction ensuite le col de la Serreyrède et sa ligne de partage des eaux, ce qui signifie, si on y pense et bien qu’on n’y pense jamais, que la prochaine pause pipi aura des conséquences… jusqu’à l’estuaire de la Gironde !

Mais au fait, n’aurait-on pas oublié les fromages de chèvre, de brebis, ou de vache au lait cru et aussi ces petites bulles de brasseurs locaux ou le bon petit vin des Cévennes ? Ça tombe bien, la boutique du col « Terres d’Aigoual » a tout prévu… et même davantage. Vous apprécierez à l’entrée du magasin, sur la fontaine ancrée dans le mur, le cliquetis d’une eau de source des plus fraîches qui vous rappellera peut-être que vous l’aviez justement oubliée. Le lac du Bonheur n’est plus très loin, encore quelques kilomètres, qui vous attend patiemment comme de précieux invités. Et où de bonheur, on vous le garantit, vous ne manquerez pas, dans ce périple aussi méritant que gourmand.

 

“... un fameux vent dont on dirait qu'il ressemble au brame d'un boeuf, autrement dit en patois au "bramabuou"”

Les pauses gourmandes :

  • « Au gré des saisons », boutique paysanne, avenue du mont Aigoual à Ganges. Ouvert du lundi au samedi de 9 h à 19 h, fermé le dimanche.
  • « Coopérative Origine Cévennes », route de Valleraugue, Pré de Cluny à Saint-André-de-Majencoules. Tous les jours, 10 h-13 h et 14 h-18 h.
  • « Terres d’Aigoual », magasin de producteurs au col de la Serreyèrede, Val d’Aigoual. Du mardi au vendredi de 14 h à 17 h, samedi et dimanche de 11 h à 17 h. Fermé le lundi.

À visiter aussi en chemin :

  • Le Jardin des Sambucs, un jardin privé remarquable et poétique. Le Villaret à Saint-André-de-Majencoules. Ouvert du 12 avril à mi-septembre, tous les jours de 11 h à 17 h 30.
  • L’arboretum de l’Hort de Dieu, grand laboratoire du reboisement du massif de l’Aigoual par Georges Fabre et Charles Flahault, lieu de pèlerinage des botanistes. Près du col de la Serreyrède. Ouvert toute l’année. Gratuit.
  • L’Observatoire du mont Aigoual, devenu le « Climatographe », restauration, exposition permanente sur le changement climatique, etc. Tous les jours à partir du 24 avril de 10 h à 13 h et de 14 h à 18 h.
  • L’abîme de Bramabiau, rivière souterraine, à Camprieu. Ouvert tous les jours d’avril à septembre, de 10 h 30 à 16 h 30.

Partager