Vincent Croizard, ou l’art de l’éphémère
Plutôt que de défendre une recette phare qui deviendrait son emblème, le chef base toute sa créativité sur l’association sans cesse renouvelée des produits locaux.
Par Agathe Beaudouin | Photographie Thomas Heydon
Quand il lui a été proposé de participer à Fest’in Med, le festival de la cuisine méditerranéenne qui se déroule en septembre à Nîmes, Vincent Croizard s’est immédiatement mis en quête d’un plat. « Le thème était le riz », précise le chef qui, rapidement, imagine un mariage terre-mer, pour « réunir toutes les saveurs du Gard ». Pour l’occasion, le restaurateur propose un tartare de taureau de Camargue aux picholines, réhaussé d’un crémeux de jaune d’œuf travaillé avec de la poutargue, accompagné d’un riz rouge de Camargue et d’une huître, le tout agrémenté d’une sauce à base de vin rouge. Un plat unique, une signature éphémère qui a fait le bonheur des épicuriens le jour-J… Et seulement ce jour-là !
Une fugacité que Vincent Croizard revendique : si certains plats sont directement associés à des chefs (l’île flottante aux truffes de Provence sur son velouté de cèpes des Cévennes de Michel Kayser ; le gargouillou de Michel Bras, la purée de Joël Rebuchon ou le blanc-manger de Jean-François Piège), le Nîmois de 51 ans n’a jamais présenté un mets
particulier qui reviendrait chaque saison sur la table de sa maison. Vincent Croizard ne s’en cache pas : il éprouve une certaine lassitude avec la répétition. Dans le secret de sa cuisine de la rue des Chassaintes, où il compose ses recettes depuis 15 ans, le chef réinvente ses plats chaque mois. « Même si j’utilise les mêmes aliments, la plupart du temps des produits locaux et de terroir, j’ai besoin de renouveler les recettes en imaginant de nouvelles associations. » Seule exception à la règle : le crocus de Nîmes (notamment composé de pélardon), la spécialité fromagère emblématique de la Cité des Antonin que le chef avait revisitée à sa façon. Parce qu’elle était sollicitée, Vincent Croizard a pris sur lui pour la proposer… sur deux saisons ! Un temps long à l’échelle de la révolution permanente d’une carte toujours en mouvement.
Restaurant Vincent Croizard
17, rue des Chassaintes à Nîmes
Ouvert le mercredi soir ; midi et soir du jeudi au dimanche.
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