La grenade réamorcée
Par Thierry Allard | Photographie Adeline Justamon
Installé à Domazan, Jean-Claude Peretto a relancé la culture du grenadier en France. Parti d’une feuille blanche, ce pionnier a su rendre sa place à un fruit méditerranéen par excellence dont on redécouvre peu à peu les vertus.
« On me prenait pour un fou », rejoue Jean-Claude Peretto. Quand à 55 ans, ce cadre commercial quitte la région parisienne et un poste rémunérateur pour son sud natal afin de se lancer dans une carrière agricole et la culture d’un fruit méconnu, ils ne sont pas nombreux à croire en ses chances… Et pourtant ! Cet arboriculteur est aujourd’hui considéré comme l’un des pionniers de la relance de la grenade dans l’Hexagone. Nous sommes au mitan des années 2000, et à l’époque, « la France ne compte que très peu de vergers grenadiers, et il n’y avait pas de grenades de bouche », explique l’agriculteur installé à Domazan. Tout le marché reste à créer mais notre homme croit au destin d’un fruit gorgé d’antioxydants. La grenade ne demande qu’à être associée à la tendance de ce début de nouveau millénaire : les aliments santé. « J’avais fait une étude de marché. Aux Etats-Unis, il y avait un fort regain d’intérêt pour la grenade. Or, tout ce qu’il se passe là-bas, vous le retrouvez cinq ans après en France », analyse-t-il à l’époque. L’histoire lui donnera raison. Rapidement, son exploitation décolle. Elle produit annuellement jusqu’à 200 tonnes de jus et de grenades de bouche, bio exclusivement… Jusqu’en 2019, année où ses vergers sont ravagés par un incendie. Pratiquement tous les arbres de Jean-Claude Peretto flambent, et avec eux plus de dix ans de travail. « J’ai failli tout lâcher », souffle-t-il. Grâce à une aide de la Région Occitanie, notre pionnier peut repartir et replanter ses vergers. Ses clients lui renouvellent leur confiance. « J’en ai profité pour mettre dix nouvelles variétés, des grenades de bouche et d’autres pour de nouvelles applications comme la bière ou la limonade », dit-il, reparti pour un tour à 70 ans, même si sa production est encore convalescente, dix fois inférieure aux années les plus fastes. Au fond, qu’importe la quantité, tant qu’il y a la qualité : elle convainc les palais les plus fins, notamment celui du chef Serge Chenet*. « Je ne sais pas si je travaille bien, mais je travaille honnêtement », concède modestement l’agriculteur, avant d’ajouter : « jusqu’à la fin de ma vie, je serai un débutant. »
Les produits de Jean-Claude Peretto sont en vente dans la plupart des magasins bio du Gard. Plus d’informations : grenade-de-france.com
LE POINT DE VUE DE Serge Chenet*
« Ce que j’aime, c’est d’abord l’homme. C’est un passionné. La grenade est un produit local dont je me sers pour équilibrer les plats : elle donne un peu de croquant et d’amertume au foie gras poêlé. Avec la lotte, la grenade peut remplacer la groseille dans le bouillon.»
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