Sébastien Roussel met le riz au service de la Camargue
Par Guillaume Mollaret | Photographie Jean-Claude Azria
Par l’apport en eau douce nécessaire à sa culture, cette céréale préserve les marais des remontées de sel.
« La rizière est à présent à sec. D’ici une quinzaine de jours les épis seront mûrs. Il sera temps de moissonner. » Debout devant l’un de ses champs, Sébastien Roussel, riziculteur installé à Saint-Gilles, détaille le cycle du riz, une céréale récoltée à la miseptembre et dont la Camargue produit quelque 80 000 tonnes chaque année sur une surface de 13 000 hectares. Riz long, mi-long ou riz rond, ce Camarguais âgé de 39 ans livre sa production au silo d’un acheteur en gros qui va ensuite commercialiser ce riz à sa marque ou bien à un transformateur.
« Plus que la production de riz, c’est la protection de la Camargue que je défends car j’effectue une rotation de mes 220 hectares de culture avec du blé dur », soutient Sébastien Roussel, l’un des 160 producteurs de riz de Camargue et donc de France, où se produisent une soixantaine de variétés. « Sans l’apport d’eau douce que nous amenons dans nos champs, les sols seraient aujourd’hui dévorés par le sel marin, qui ne cesse de monter. La biodiversité que nous aimons tant admirer s’en trouverait meurtrie comme jamais », poursuit-il.
En ce sens, le syndicat des riziculteurs de Camargue, par la voix de son président Bertrand Mazel plaide sans relâche pour « un entretien par l’Etat des digues protégeant les terres des entrées maritimes. Datant du règne de Napoléon III (1848-1870) elles ne font pas l’objet d’une attention suffisante et ne jouent plus pleinement leur rôle », regrette-t-il.
Tel qu’on le connaît aujourd’hui, le parc naturel régional de Camargue a largement été façonné par l’homme qui, depuis le Moyen-Âge s’est donné pour mission de maîtriser cette zone marécageuse en y apportant une activité agricole faite de pâturage et de vigne… avant que la culture du riz ne s’impose à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, grâce notamment à une importante main d’œuvre asiatique. A cette époque comme aujourd’hui encore, les céréaliers utilisent, grâce à des pompes, l’impressionnant réseau de porte-eaux et roubines constitué voilà plusieurs siècles pour tantôt drainer, tantôt irriguer les champs grâce à l’eau pompée dans le Petit Rhône. C’est à même cette eau douce que, le printemps venu, ils sèment le riz à la volée -désormais au moyen de tracteurs équipés de roues spéciales pour ne pas s’embourber. Cette période correspond à celle où le riziculteur dort le moins.
« C’est un moment que le flamant rose apprécie particulièrement… Il s’alimente et piétine. Et là où il passe, rien ne repousse. C’est un animal protégé que l’on respecte. Il n’y a pas d’autre moyen de le faire fuir que de l’effrayer », détaille Sébastien Roussel qui, à la tombée du soir, se relaye avec son père pour faire déguerpir un volatile que le riziculteur apprécie par ailleurs de voir voler dans le marais proche de son élevage de chevaux, qu’il destine notamment aux manades. Sur des terres transmises de génération en génération, Sébastien Roussel réunit des passions qui font la richesse de la Camargue. Une activité aussi singulière que nourricière.
Sébastien Roussel
Mas du Grand Bizerty
30800 Saint-Gilles
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