Château Mourgues du Grès : au-delà de l’excellence, l’affirmation du style
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Dans les années 60, alors que les vignobles de plaine aux cépages abondamment producteurs dominaient la scène, un homme osa tracer une voie vers l'excellence.
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Par Nicolas PONZO | Photographie JEAN-CLAUDE AZRIA
Dans les années 60, alors que les vignobles de plaine aux cépages abondamment producteurs dominaient la scène, un homme osa tracer une voie vers l’excellence. Cet homme, le père de François Collard, décida de défricher quelques parcelles de coteaux, prenant le pari audacieux pour l’époque de planter les toutes premières syrahs de la région. Cette initiative marqua le début d’une transformation profonde pour l’ensemble de l’appellation, puisque les autres propriétés de Costières de Nîmes suivirent progressivement cette voie, jusqu’à ce que la Syrah y devienne majoritaire à la fin des années 90.
Lorsqu’en 1994, François Collard et son épouse Anne reprennent les rênes du domaine familial, l’ambition est claire : enrichir et surtout affirmer l’héritage vinicole laissé par le père. Pour eux, le façonnage du paysage dont les vignerons sont les auteurs est bien plus qu’une question esthétique : c’est un élément clé de l’identité de l’AOC, une identité qu’ils se sont efforcés de retranscrire dans les vins mais aussi dans chaque aspect de l’accueil au domaine. Leur ambition est de partager leur passion avec les visiteurs, en adoptant une approche qui permet de faire ressentir une véritable expérience sensorielle du terroir. C’est ainsi qu’ils ont instauré nombre d’activités offrant à chaque visiteur une immersion authentique dans leur univers viticole.
Pour autant, la vision d’Anne et François n’est pas, loin s’en faut, limitée à l’accueil des visiteurs. Profondément engagés dans une démarche d’amélioration continue de la qualité de leurs vins, ils travaillent d’arrache-pied à exprimer au mieux, avec une large palette de cépages, la grande diversité du nuancier de sols représentés sur le domaine. Ils bâtissent ainsi un « style Mourgues du Grès » qui se diffuse rapidement chez les cavistes les plus exigeants et sur les tables les plus prestigieuses.
Convaincus de bénéficier de terroirs d’exception, aux sols profonds, drainants, dotés d’une bonne capacité de rétention d’eau pour compenser les étés arides, ils se sont également attachés à préserver la vitalité et à en révéler toute la richesse à travers des pratiques culturales respectueuses de l’environnement. C’est ainsi que le domaine a progressivement évolué vers une approche agroécologique, d’abord en agriculture biologique, puis en biodynamie certifiée depuis 2020.
C’est cette même année que débute une nouvelle phase d’évolution du domaine, avec l’arrivée de la troisième génération familiale. Romain, fils d’Anne et François, se projette dans la continuité autant que dans le renouveau : « accompagner une évolution, pas lancer une révolution ! » Passé par l’Oregon, riche d’une précieuse expérience chez l’iconique Jean-Louis Chave et fort d’une approche sensible du terroir, ce jeune ingénieur agronome porte une vision éclairée de l’évolution nécessaire pour affirmer encore le style de ses vins. Perpétuant le travail de ses parents, il prône une « mise en valeur paysanne » du travail à la vigne, fondée sur une approche très manuelle des interventions. Cette philosophie a pour but d’affiner au plus juste le travail à la parcelle pour peaufiner la mosaïque des terroirs. Cette attention au détail pourrait-elle impulser une évolution des cuvées ? « Cela nécessite encore beaucoup de travail » répond-il avec son sourire aussi doux que son regard est déterminé. Pour lui, l’assemblage reste une notion primordiale, l’aboutissement de l’alchimie qui permet de sublimer la diversité des terroirs et des cépages.
Les religieuses des cailloux
Ancien domaine dépendant des Ursulines de Beaucaire et
datant du XVIème siècle, Mourgues du grès signifie
littéralement Religieuses des cailloux en provençal. Et si le
terme mourgues n’est plus usité, les grès qualifient toujours
localement les sols de galets déposés au quaternaire par le
Rhône et caractéristiques de l’AOC Costières de Nîmes.
Dans un contexte de défi climatique croissant, le maitre mot de Romain est l’équilibre. Or avoir des vignes équilibrées, cela part du sol, de sa vitalité. Le développement de la vie des sols est la clef pour s’adapter aux effets du changement climatique et créer les conditions de l’équilibre dans les parcelles. C’est dans cette démarche d’affirmation de la singularité du terroir de chaque parcelle et de préservation de l’environnement que réside la vision qu’il compte perpétuer dans les années à venir. •
Château Mourgues du Grès
1055 CHEMIN MOURGUES DU GRÈS, 30300 BEAUCAIRE
(sur la D38 entre Bellegarde et Beaucaire)
mourguesdugres.com
Terre de feu : porte-flambeau…
de la fraicheur !
Si la Syrah reste le cépage phare du domaine, avec notamment l’incontournable cuvée Capitelle (18€), des expérimentations sont menées au domaine avec des cépages méditerranéens rapportés par exemple de Corse et d’Italie dans Les Voyageurs (9,5€). La cuvée Terre de feu (15,5€) fait quant à elle la part belle à la tradition rhodanienne avec les plus vieilles vignes de Grenache du domaine. D’une rondeur puissante, aux tanins salivants, elle offre des senteurs de liqueur de cerise, de fruits secs et de cacao, couronnées d’une note mentholée. Sa grande longueur caractérisée par une tension minérale et une fraicheur époustouflante en fait l’archétype emblématique des vins de la rive droite du Rhône, qui se distinguent par leur élégance d’un style rive gauche plus onctueux et plus solaire.
“Perpétuant le travail de ses parents, Romain prône une « mise en valeur paysanne » du travail à la vigne, fondée sur une approche très manuelle des interventions.
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